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Synopsis
Saviez-vous qu’au 17e siècle, les animaux pouvaient être jugés pour avoir commis un crime ? Maître Pompignac, risée du barreau, pense avoir trouvé l’affaire de sa vie. Défendre la jeune et innocente Josette, accusée à tort du meurtre d’un maréchal… Mais c’était sans compter sur son adversaire, le redoutable et réputé Maître Valvert, et surtout sur Josette, qui s’avère n’être autre… qu’une chèvre !
Critique
Avec un duo d’acteurs au sommet, « Les Chèvres ! » est une comédie historique puissante. Drôle et absurde tout en étant instructif, voilà le tour de force que le réalisateur Fred Cavayé a réussi. Malgré de fabuleuses qualités, le film n’a malheureusement pas rencontré son public, ni obtenu la considération méritée. Un film à voir et à hautement recommander !
Les procès d’animaux
Costumes, perruques, décors majestueux, calèches… « Les Chèvres ! » dévoile en premier lieu une réalité historique que beaucoup ignorent : Les procès d’animaux.
Avant la Révolution, ces derniers étaient effectivement traduits en justice. Vêtus comme des humains, certains étaient condamnés à mort. Cette pratique, soutenue par l’église, reposait sur la croyance selon laquelle chaque être vivant possédait une âme et devait répondre de ses actions.
Le fond historique est d’autant plus étudié que le film évoque cette guerre de territoire du XVIIème siècle entre la France et la Savoie.
Avec autant d’éléments savamment travaillés, « Les Chèvres ! » s’affirme comme une comédie extrêmement bien élaborée, un cas d’école qui, même si les caricatures sont parfois grossières, a le mérite de raconter un événement de l’histoire de France.
Au tribunal comme au spectacle !
Ces accusés à quatre pattes avaient le droit à de vrais procès avec des jurés, un avocat de la défense, un procureur du roi, une accusation et des plaidoiries. Il y avait aussi ce qu’on appelait des démonstrations, qui n’étaient autres que des mises en scène théâtrales supposées des faits.
À cette époque, ces affaires étaient des événements judiciaires. Le public venait au tribunal comme s’il allait au théâtre. Chaque acteur du procès se devait de faire le show, en particulier les avocats, sachant que le verdict dépendrait des préférences du public, et non du juge.
Le réalisateur a implicitement cherché à calquer cette histoire d’antan avec les codes de notre monde actuel. À travers ce procès, il a esquissé une analogie sur la culture des réseaux sociaux, où le jugement médiatique est semblable et immédiat. La scène du pouce levé pour dire « Pour » ou « Contre » est un exemple inspiré du « Like » de nos jours.
Dany Boon se réinvente
« Les Chèvres ! » est une belle surprise dans laquelle Dany Boon se réinvente et se détache habilement des comédies dans lesquelles on avait l’habitude de le voir. La star ch’ti était souvent cantonnée aux mêmes types de rôles. Cependant, ici, l’acteur a admirablement su se remettre en question et se renouveler.
Dans le rôle de Maître Pompignac, il incarne un avocat doté d’une grande empathie. Alors que les jurés, tout comme le public, assistent à un spectacle, lui prend sa mission très au sérieux. Il ressent de la compassion pour les victimes et se définit comme un avocat visionnaire, défendant ses clients avec ardeur.
Jérôme Commandeur parmi les plus grands
Aux côtés de Dany Boon, Jérôme Commandeur se retrouve grimé en Maître Valvert. Avocat de la défense, c’est un parisien méprisant et personnalité fortunée. Il multiplie les tenues farfelues et les perruques flamboyantes. Le procès de cette chèvre n’est pour lui qu’une formalité, l’occasion de se mettre en avant et de maintenir sa popularité.
Méchant mais très malin, Jérôme Commandeur interprète un personnage dans l’opulence avec brio. Dans ce film, son jeu est tel qu’il rivalise avec le talent des plus grands, rappelant ceux de Bourvil et de De Funès.
La révélation de ce film est sans conteste Claire Chust. Révélée dans « Scènes de Ménages », la comédienne était jusqu’alors cantonnée à des rôles secondaires de jeunes filles candides. En tant que troisième personnage principal, elle se distingue et s’affirme progressivement, laissant entrevoir une carrière des plus prometteuses.
L’une des qualités majeures de « Les Chèvres ! » réside dans la présence d’une voix off admirablement dosée. Ni trop présente, ni trop discrète, cette narration, en plus d’être maîtrisée, nous offre une conclusion fabuleuse, à la fois romanesque et romantique. Alors, dans cette fable, qui a raison ? L’homme ou la chèvre ?
[Bande-annonce – Les Chèvres !]
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