3/5
Synopsis
Paris, 1894. Qui est Fanni qui prétend s’être laissée enfermer volontairement à l’Hôpital de la Salpêtrière ? Cherchant sa mère parmi la multitude des femmes convaincues de « folie », Fanni découvre une réalité de l’asile toute autre. Le dernier grand bal de la Salpêtrière se prépare. Politiques, artistes, mondains s’y presseront. Dernier espoir d’échapper au piège qui se referme…
Critique
À la fin du 19ème siècle, l’Hôpital de la Salpêtrière était devenu tristement célèbre. On y enfermait des femmes considérées comme aliénées et leur prétendue démence était traitée par la torture.
Avec de belles qualités, « Captives » est un huis clos saisissant. Film engagé et éminemment féministe, Arnaud des Pallières nous plonge dans un quotidien cloîtré qui s’apprête à être interrompu par le « Bal des folles », l’évènement annuel de l’établissement.
Parce qu’elles dérangeaient la société
« Captives » est un film d’époque qui s’impose presque comme un docu-fiction, tant il s’inspire de faits réels. Féministe et engagé, il retrace l’histoire de femmes enfermées, en partie pour cause de folie. Mais pour beaucoup d’entre elles, simplement parce qu’elles dérangeaient la société.
Au cours du temps, ce lieu est devenu l’opportunité ultime de mettre les femmes gênantes à l’écart. En témoigne le personnage incroyable de Carole Bouquet, Hersilie Rouy, une pianiste française ayant réellement existé, gentiment isolée par ses frères pour laisser place à l’héritage familial.
Grandes gueules, coupable d’avoir subi un avortement, crises d’hystérie, les soignantes leur infligeaient des traitements inhumains cherchant à les rendre folles pour finalement justifier leur captivité.
Comme en prison, toutes semblables
Ce qui frappe dans « Captives », c’est la représentation de l’ensemble des classes sociales au sein de cet asile. Bourgeoises, prostituées, domestiques, délinquantes ou marginales, peu importe, elles se retrouvent toutes réunies sans distinction.
S’installe alors un esprit de solidarité entre elles. Comme en prison, certaines marchandent pour avancer, d’autres négocient pour survivre, manger ou s’octroyer des faveurs.
Un regard extérieur neutre
Interprétée par Mélanie Thierry, Fanni incarne la narration du métrage. Lorsqu’elle arrive, elle porte un regard extérieur neutre, semblable à celui d’une journaliste infiltrée. À travers des scènes de bain de glace, de privation de nourriture et d’exclusion, le film révèle progressivement des dérives internes auxquelles elle est confrontée. Cette congrégation à part, régie par ses propres règles, est coupée du monde extérieur.
D’une totale inconscience, Fanni a choisit de se faire volontairement interner afin de retrouver sa mère. Disparue depuis vingt ans, elle a pourtant reçu récemment une lettre de sa part, qui l’a alertée…
Josiane Balasko et Marina Foïs
Autre personnage des plus marquants : Marguerite Bottard, la directrice de l’établissement. Interprétée par Josiane Balasko, on comprend rapidement qu’elle n’est pas aussi terrible qu’il n’y paraît. Admirative devant de nombreux médecins avec qui elle a œuvré, Marguerite est une fille de paysan qui a travaillé dur pour réussir. À présent responsable d’un hôpital comptant 500 femmes, elle représente un véritable modèle d’ascension sociale.
Aussi, à ses côtés, son adjointe nommée La Douane, est d’une affreuse méchanceté. Elle prend un plaisir pervers à être terrifiante et à faire peur aux patientes. Elle s’acquitte du sale boulot avec une certaine fierté. Il est donc impressionnant de voir Marina Foïs incarner ce rôle malsain au visage fermé, et physiquement transformé.
Un final des plus décevants…
« Captives » est un vrai thriller qui prend le temps de poser ses bases. Tel un loup dans la bergerie, Fanni est entrée volontairement et de ce fait, elle se montre très rationnelle. Elle sait influencer ses camarades et elle vient déstabilise tout un ordre établi, ce qui crée une pression au fur et mesure du film.
Cependant, malgré un final qui s’annonçait prometteur avec « Le Bal des folles », cette dernière partie déçoit. On espère en permanence un sursaut d’action de la part de Fanni, qu’elle parvienne à se sauver. Or, l’issue est tellement littéraire qu’elle en devient floue. Tout est tiré dans la longueur, suggéré et implicite.
Le récit plonge alors dans le pathos avec une fin trop imagée. « Captives » nous montre comment construire un suspense haletant pendant 1h30, pour finalement nous laisser non pas soulagés mais dépourvus… De quoi nous rendre fou !
Malgré une note de contrariété sur la fin, « Captives » s’affirme comme une référence en matière de film d’époque. Inspiré de faits réels historiques, Arnaud des Pallières parvient à en faire un vrai film d’actualité en l’honneur de la femme.
[Bande-annonce – Captives]
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