3/5
Synopsis
Première d’atelier au sein de la Maison Dior, Esther participe à sa dernière collection de Haute-Couture avant de prendre sa retraire. Un jour, elle se fait voler son sac dans le métro par Jade, 20 ans. Cette dernière, prise de remords, décide de lui restituer. Séduite malgré elle par l’audace de la petite, Esther lui offre la chance d’intégrer les ateliers de la Maison comme apprentie. L’occasion de transmettre à Jade un métier exercé depuis toujours par la beauté du geste.
Critique
Femme de lettres avant de venir cinéaste, Sylvie Ohayon a, pour son second métrage, choisit d’adapter sa plume dans une romance entre deux femmes antinomiques, bientôt réunies grâce au monde de la « Haute-Couture » !
Esther, sexagénaire solitaire, va rapidement se lier d’affection avec Jade, jeune de la cité de Saint-Denis, qui l’a volée. Bien que l’idée d’une relation que tout oppose soit appréciable sur le papier (« Intouchables » en étant le meilleur exemple), il y a malgré tout quelques fausses notes. Peut-être trop romancé, le récit qui, par son titre évocateur tenait la promesse d’une immersion dans le milieu de la mode, finit par se confondre avec la vie intime des personnages.
Attachants, souvent drôles, les protagonistes frôlent la caricature à de nombreuses reprises. Le concept de disparité sociale est intéressant mais l’injure et l’agressivité de Jade sont par moment stigmatisantes, voir gênantes, quant aux préjugés déjà bien dur à gommer sur les jeunes générations issues des quartiers.
En revanche, Nathalie Baye en tête d’affiche est un choix judicieux. Elle est l’incarnation même de la célébrité et du chic à la française. Il n’y avait que cette ancienne égérie des produits Garnier, d’ores et déjà ambassadrice du cinéma français à l’international (« Arrête-moi si tu peux », « Juste la fin du monde ») qui pouvait prendre position sur un tel rôle, pour mettre en avant l’une des plus grandes manufactures françaises.
D’un œil neuf, outre la découverte des coulisses de la mode, le film tient aussi a explorer les codes du monde du travail : L’importance de la ponctualité, la pause déjeuner, les relations socio-professionnelles…
Peut-être d’ailleurs que ce point, en plus de la vie privée des personnages, était-il de trop dans ce conte moderne parfois mal dosé. En effet, une relation amoureuse entre collègues et une mésentente avec une des couturières étaient-ils indispensables ?
Quoi qu’il en soit, « Haute-Couture » est une ode à la valeur du travail, une source de rêve et d’émancipation pour les jeunes filles et les passionnés de mode. Le monologue de Nathalie Baye sur la différence entre un « boulot » et un « métier » renforce un angle éducatif puissant rarement exploré dans le cinéma français. Un métier, quel qu’il soit, c’est l’art de la transmission, un savoir-faire, une pédagogie que l’on peut transporter partout avec ses mains.
Au-delà d’être un film, c’est donc un hommage à ceux (et surtout à celles) que l’on a longtemps appelées « les petites mains. » Présentent lors des défilés, à l’approche des lancements de collection ou même pour les commandes clients, ces icônes cachées dévorées par la passion de leur métier, ne comptent pas leurs heures. Dans le souci du moindre détail, ces ouvrières de l’ombre au savoir-faire exceptionnel représentent humblement le patrimoine du luxe à la française.
Bilan
Une belle promenade pas toujours cousu de fil blanc, mais qui donne du sens à la valeur des choses.
Une histoire de transmission très touchante, portée par l’interprétation sincère de tous, premiers comme seconds rôles.Très beau film, très bien écrit par Sylvie Ohayon. Le duo Nathalie Baye / Lyna Khoudri fonctionne merveilleusement bien.