4/5
Synopsis
Jeanne Vaubernier, fille du peuple avide de s’élever socialement, met à profit ses charmes pour sortir de sa condition. Son amant le comte Du Barry, qui s’enrichit largement grâce aux galanteries lucratives de Jeanne, souhaite la présenter au Roi. Il organise la rencontre via l’entremise de l’influent duc de Richelieu. Celle-ci dépasse ses attentes : entre Louis XV et Jeanne, c’est le coup de foudre… Avec la courtisane, le Roi retrouve le goût de vivre. A tel point qu’il décide d’en faire sa favorite officielle.
Critique
Avec ses allures façon « Pretty Woman », « Jeanne du Barry » est une romance passionnelle, dans laquelle Maïwenn ressuscite Versailles. Un come-back en grandes pompes pour cette réalisatrice grandement contestée, à la fois sensible et talentueuse.
Un contexte sulfureux
Film d’ouverture du Festival de Cannes 2023, « Jeanne du Barry » acte le grand retour de Johnny Depp depuis son procès contre son ex-compagne. Aussi, bien que « Polisse » et « Mon Roi » soient des chefs-d’œuvre incontournables, la personnalité de Maïwenn est loin de faire l’unanimité. D’autant plus que la comédienne est engluée dans une affaire d’agression contre le journaliste Edwy Plenel.
C’est dans ce contexte sulfureux et délicat que « Jeanne du Barry » a fait une sortie remarquée. Un film surprenant car romantique, doux, et surtout, bien plus sage qu’il n’y parait.
L’amour avant l’histoire !
Il faut savoir que « Jeanne du Barry » n’a aucunement l’intention de prétendre détenir une valeur historique. Certes, dans les grandes lignes, les faits sont réels, mais la relation entre les deux amants est ultra-romancée voire, idéalisée. Le récit passionnel évite le côté poussiéreux des films d’époque, et l’histoire d’amour s’affirme par une vision extrêmement moderne.
Risible, drôle, et même grotesque, l’arrivée de Jeanne auprès de la Cour Royale est amplifiée par la naïveté légère des premiers sentiments. Partie à la découverte d’un monde inconnu, son regard rend la perception des protocoles et des convenances ridicules auprès d’un Roi qui s’en amuse. De quoi rire, sourire et vibrer d’amour !
Dans les coulisses de la Cour
Comme tout biopic qui se respecte, « Jeanne du Barry » fait le choix de ne raconter en détail qu’une parcelle de vie de cette roturière devenue Comtesse. Son enfance, son adolescence et sa vie après le Château sont soigneusement résumés par une voix off. Ainsi, le film laisse une place majoritaire à son passage à la Cour de Versailles, de son entrée remarquée jusqu’à la mort du Roi.
Cette immersion dans les coulisses quotidiennes du royaume nous présente un univers réglé au centimètre près. Codes sociaux, critères vestimentaires, tel est le cadre de vie régit par des règles parfois absurdes, appelé « l’Etiquette » comprenant les us et coutumes à impérativement connaître. Des conventions que Jeanne du Barry va dézinguer d’un revers de main…
Jeanne, la frondeuse
Candide, un brin insolente, cette insouciance va vite la catégoriser comme une frondeuse auprès de la Cour. Influente à son insu, elle va provoquer des sursauts, notamment en s’habillant en homme, en partant à la chasse avec le Roi, ou en lançant la mode des robes à rayures. Jeanne du Barry, c’est le portrait d’une femme exubérante qui bouscule les mœurs malgré elle grâce à sa spontanéité.
Et c’est Maïwenn qu’il faut applaudir dans l’incarnation de ce personnage ! Car, en plus de mettre en valeur une figure historique, elle incarne la souffrance d’une femme divisée. Officialisée favorite, elle va vivre une situation déchirante : Celle d’occuper la place de première dame, sans ne jamais en avoir eu le titre…
Benjamin Lavernhe, le troisième homme
Alors que l’affiche annonce un duo de tête composé de Maïwenn et de Johnny Depp, le film se révèle finalement être un trio, notamment grâce un homme de l’ombre, incroyablement incarné par Benjamin Lavernhe.
En tant que conseiller privilégié et ami proche de Louis XV, il est l’intermédiaire intime entre le Roi et Jeanne du Barry. Un rôle compliqué pour le comédien car il respecte une droiture exemplaire, tout en étant attachant et discret.
Véritable révélation du métrage, ce second rôle est l’un des meilleurs que l’acteur ait pu incarner à ce jour, et peut être même l’un des plus notables pour un film français. Une récompense à venir ne serait pas déméritée.
Des décors flamboyants
« Jeanne du Barry », ce sont aussi des décors flamboyants qui redonnent vie au Château de Versailles, et à notre patrimoine national.
Les plans panoramiques fait grâce à des drones sont incroyablement réussis. Ils ressuscitent la splendeur du lieu dans son jus. Aussi, plusieurs scènes dans le Palais des Glaces sont fabuleuses, la plus marquante étant celle où le Roi présente Jeanne comme sa favorite officielle à la Cour.
« Jeanne du Barry » est le résultat d’une ambition démesurée du cinéma français. Après un travail de qualité d’une dizaine d’années, cette romance s’inscrit parmi ces films enthousiastes qui font aimer la France.
Profondément féministe, ce portrait salutaire d’une reine qui n’a jamais été, montre l’importance et l’influence que les femmes ont toujours eues auprès des hommes de pouvoir et ce, depuis des siècles.
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