4/5
Synopsis
Deux jeunes femmes se réveillent chaque matin aux portes du palais de justice de Montréal. Elles veulent assister au procès d’un tueur en série qui les obsède. Ce dernier a filmé la mise à mort de ses victimes. Cette obsession maladive les conduira à tenter de mettre la main sur l’ultime pièce du puzzle. Il pourrait permettre de définitivement confondre celui que l’on surnomme le Démon de Rosemont. La vidéo manquante de l’un de ses meurtres.
[Bande-annonce – Les Chambres Rouges]
Critique
Film québécois à succès, « Les Chambres Rouges » a attendu quelques mois avant de s’exporter. Sous la direction du réalisateur Pascal Plante, le film traite de la banalité du mal dans le mystérieux prisme du dark web. Un thriller glaçant qui montre que n’importe qui peut se révéler capable des pires atrocités…
Le phénomène des groupies
« Les Chambres Rouges » est un métrage surprenant et inhabituel, puisque les films policiers de ce genre se concentrent généralement sur trois orientations principales : la psychologie du tueur, celle des victimes ou le déroulement du procès.
Cependant, dans ce cas précis, le réalisateur s’est penché sur le phénomène préoccupant des groupies qui gangrènent les procès, notamment en outre-Atlantique. En s’emparant du sujet, il a cherché à décrypter les profils de ces femmes.
Pour cela, « Les Chambres Rouges » se concentre autour de deux personnages féminins complémentaires. La première, Clémentine, est constamment empreinte d’empathie. Convaincue de l’innocence de l’accusé, elle se laisse guider par ses émotions. Tandis que l’autre, Kelly-Anne, est froide, distante et mystérieuse…
Kelly-Anne, une Batman au féminin
Interprétée par Juliette Gariépy, Kelly-Anne est un personnage qui brise les conventions habituelles. Modèle photo à ses heures perdues, elle est une sportive solitaire qui ne cherche pas à plaire et n’a que très peu d’amis.
Très geek, elle se réfugie constamment dans une bulle numérique pour jouer en ligne et gérer ses cryptomonnaies. Elle ne se limite pas à être simplement bonne ou mauvaise, mais incarne une femme bien plus complexe, résolument moderne. Une part sombre en elle rappelle l’ambiguïté d’une Batman au féminin.
Nous nous interrogeons rapidement sur ses véritables intentions. Une certaine inquiétude s’installe, nous demandant ce qu’elle dissimule, ce qu’elle pense, et si elle est aussi redoutable que le tueur… Seul le dénouement viendra remettre en question toutes nos certitudes… Brillant.
Un tueur mythifié
Le tueur psychopathe accusé, Ludovic Chevalier, est interprété par Maxwell McCabe. Le réalisateur avoue avoir été gêné de proposer un rôle sans texte, ni grande interprétation à un comédien d’une telle qualité.
Enfermé dans le box des accusés, le tueur est volontairement écarté du film pour être mythifié. L’idée est de le rendre impressionnant en l’isolant. Une manière impressionnante de façonner un être terrifiant qui prend tout son sens dans cette séquence des plus effrayantes, où il adresse un salut de la main à Kelly-Anne.
L’horreur sonore
C’est une tendance qui revient de plus en plus au cinéma : Exploiter des hors-champs pour suggérer l’horreur possible, plutôt que de la montrer.
Concernant le sujet initial, le film utilise la légende des « red rooms ». Il s’agit de salles où des individus sont payés pour commettre des actes de viols et de tortures devant une caméra.
En évoquant sans cesse ces vidéos atroces où le tueur assassine et découpe des jeunes femmes, « Les Chambres Rouges » joue sur ce que l’on ne voit pas, laissant place à de nombreuses suppositions. Les images ne sont pas montrées, mais chaque instant où les personnages les visionnent semble insoutenable. Les détails sonores sont par ailleurs largement suffisants pour que le spectateur imagine le pire.
Pour beaucoup, cela est amplement suffisant, mais pour des personnages comme Clémentine, cette groupie qui adule le meurtrier présumé, il y a ce besoin pervers absolument vouloir voir ce qui s’est passé…
Film complexe et captivant, « Les Chambres Rouges » est une surprise glaçante. Son scénario extrêmement réfléchi nous absorbe dans son contexte noire, clinique et brillant.
On ressort véritablement sonné de la salle, avec une multitude de questions en tête, dont la plus terrible d’entre elles : Les red rooms existent-elles réellement ?
[Bande-annonce – Extrait « Le Regard »]
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