3/5
Synopsis
Une nuit, une femme en danger appelle la police. Anna prend l’appel. Un homme est arrêté. Les semaines passent, la justice cherche des preuves, Aly, Anna et Dary font face aux échos de cette nuit qu’ils ne parviennent pas à quitter.
Critique
« Quitter la nuit » marque les esprits dès les premières minutes grâce à une introduction saisissante, rappelant fortement « The Guilty » avec Jake Gyllenhaal, sorti sur Netflix en 2021. Dans un centre d’appels d’urgence, une femme enlevée lance une demande de secours sans le dire. Nous suivons avec angoisse le déroulement délicat de la procédure d’alerte.
Or, le film prend ensuite une direction inattendue. Il suit la reprise du quotidien des trois personnages impliqués dans cette affaire. Mais leurs routines vont se heurter à des procédures antipathiques, pesantes et fastidieuses.
Un regard critique sur l’institution judiciaire
« Quitter la nuit » adopte une position neutre et ne cherche pas à avoir un quelconque jugement sur l’affaire en question. Le film s’attarde plutôt à porter un regard critique sur les lacunes des institutions et leurs manquements.
La justice pénale est conçue pour punir et faire respecter les lois. Or, elle néglige souvent de préparer les victimes aux conséquences post-traumatiques.
C’est ainsi que « Quitter la nuit » montre que la victime, représentée par Aly, n’est pas placée au centre du processus juridique. Parfois, elle se retrouve même contrainte de se défendre avec insistance sur des détails, illustrant un traitement déséquilibré entre elle et l’accusé.
Le portrait d’une battante
Jouée par Selma Alaoui, le personnage d’Aly, la victime, se révèle particulièrement intéressant.
Malgré l’événement tragique qu’elle a vécu, elle choisit de ne pas se laisser abattre. Au lieu d’être submerger par ses émotions, elle continue de mener sa vie avec détermination. C’est une femme profondément préoccupée par sa guérison psychologique, en particulier pour sa fille qu’elle élève seule depuis la séparation avec son père.
Contrairement à ce que l’on pourrait attendre, Aly n’est pas animée par un désir de vengeance. Elle refuse de s’engager dans une procédure d’enquête longue et éprouvante. Elle ne se rend même pas aux rendez-vous recommandés par les médecins, trouvant les démarches contraignantes.
Une agression avec viol
Bien que cela ne soit pas de suite évident, « Quitter la nuit » parle véritablement d’une agression avec viol. Cependant, l’objectif du film n’est pas de se concentrer sur l’acte en lui-même mais de suivre la vie des personnages après cet incident.
En étant aux côtés d’Aly dans la voiture lors du coup de téléphone, le spectateur ressent l’urgence et la gravité de la situation. Il n’y a pour autant pas d’images explicites de ce qu’il s’est passé.
La réalisatrice assume pleinement cette approche mystérieuse, jalonnée de flash-backs. Les évènements de la soirée sont progressivement dévoilés. Cette retenue confère au film le timide aspect d’un thriller.
« Quitter la nuit » se distingue par sa sérénité, prenant le temps d’analyser minutieusement chaque situation. Le film mérite une attention particulière car il délivre le message d’une réalité frappante, presque sombre, sur une administration législative désuète.
Delphine Girard parvient avec brio à critiquer les institutions, sans pour autant accabler ni les victimes ni l’accusé. Une prouesse de neutralité qui mérite d’être soulignée !
[Bande-annonce – Quitter la nuit]
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