
2,5/5
Synopsis
Cléo a tout juste six ans. Elle aime follement Gloria, sa nounou qui l’élève depuis sa naissance. Mais Gloria doit retourner d’urgence au Cap-Vert, auprès de ses enfants. Avant son départ, Cléo lui demande de tenir une promesse : la revoir au plus vite. Gloria l’invite à venir dans sa famille et sur son île, passer un dernier été ensemble.
Critique
Pour ce premier long-métrage en solo, Marie Amachoukeli propose une dédicace inspirée de son vécu personnelle. Profondément attachée à sa nounou lorsqu’elle était petite, la réalisatrice a voulu interroger ce souvenir d’enfance, caractérisé par un amour inexplicable.
Film audacieux, « Àma Gloria » est la romance d’une Mary Poppins des temps modernes. Un nanny movie à la « Tully », une œuvre solaire hautement engagée, qui laisse pourtant ce sentiment amer de ne pas avoir complètement atteint son objectif.…

A hauteur d’enfant
Au delà de l’histoire, la réalisatrice à adapter le cadrage selon le point de vue de l’enfant. C’est à dire que la caméra est constamment à hauteur de la petite fille. Ainsi, lorsqu’on regarde « Àma Gloria », on voit le monde, on l’entend et on comprend l’environnement selon les perceptions de Cléro, 6 ans à peine.
Un vrai travail de fond dans lequel tout est savamment pensé. A titre d’exemple, la grammaire optique du film est délibérément floue. La petite étant myope, le but est de s’adapter à ses yeux et de se rapprocher au maximum à sa perception du monde.
De ce fait, « Àma Gloria » éveille des sensations fortes, similaires à celle de notre enfance. Et c’est précisément là qu’interviennent des séquences animées. A cet âge, on ne détient pas encore la capacité de s’exprimer ou de comprendre nos ressentis. Et ces scènes sont une façon imagée d’interpréter l’inconscient de l’enfant.

Le sacrifice d’une femme
Même si la petite Cléro reste la star du film, « Àma Gloria » est aussi l’histoire de Gloria, véritable capverdienne d’origine. Douce et aimante, cette femme a sacrifié son quotidien et sa vie de famille pour venir en France. Une mère engagée prête à élever les enfants des autres pour nourrir les siens.
Lorsque l’enfant dont elle s’est occupée vient en vacances chez elle, au Cap-Vert, il s’installe un embarras. Gloria a en effet un rapport bien plus complice avec Cléro qu’avec ses propres enfants. Elle se retrouve dans une position inconfortable entre profiter de ses derniers instants auprès de la petite. Ou retrouver sa famille encore marquée par ses sacrifices et ses absences multiples.
Cependant, avec cet aspect de vacances, le film reste pour autant très sommaire. « Àma Gloria » s’apparente plus à une innocente découverte culturelle estivale. Il y plane cette saveur déplaisante des derniers instants, où l’une comme l’autre savent qu’elles ne se reverront jamais. Rien n’est exprimé, tout est suggéré et malheureusement, ce mal-être en devient étouffant par moment…

Argent & sentiments : Un rapport délicat
Gloria étant avant-tout une nourrice, le film apporte timidement une réflexion quant au rapport étroit entre l’argent et les sentiments. D’un côté, la nounou est embauchée pour gagner sa vie. Est-ce pour autant délicat d’assumer son attachement envers l’enfant ? De l’autre, le père voit cette femme comme une employée de maison. Est-ce que selon lui, il y a des limites à ne pas franchir ?
Ce sujet est inconventionnelle, presque taboo, mais il ne faut pas oublier que cela reste en premier lieu un travail. Gloria est une migrante économique, et il s’agit d’une relation tarifée à partir du moment où elle accepte d’être payé. Une complicité biaisée par l’argent, mais finalement… Cela empêche-t-il l’amour ? Pas vraiment.

Une monotonie ambiante
La délicatesse du scénario est extrêmement touchante mais malheureusement, le sujet étant monotone, on reste rapidement sur notre faim. Par exemple, le père de Cléro reste complètement en marge du film. Il en est même absent. Il aurait intéressant d’avoir plus d’information sur son rôle au quotidien.
Aussi, afin d’être éventuellement plus attendri, peut être aurait-il été intéressant de développer leur complicité d’antan. De montrer dès le début, des moments évocateurs du quotidien, lorsque Gloria s’occupait de Cléro. Cette partie est rapidement balayé après 10 minutes de métrage…

« Ama Gloria », c’est la fabuleuse aventure d’une vie, sur fond d’adieux déchirants. Malheureusement, le film reste simple jusqu’à en devenir stérile… Ce qui en devient déchirant pour nous aussi. Un bel essai malgré tout, qui suscite notre impatience quant aux prochaines productions de cette cinéaste en devenir..
[Bande-annonce – Àma Gloria]
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