« Paranoïa » de Steve Soderbegh

5/5 !


Synopsis

Une jeune femme, convaincue d’être harcelée, est enfermée contre son gré dans une institution psychiatre. Alors même qu’elle tente de convaincre tout le monde qu’elle est en danger, elle commence à se demander si sa peur est fondée ou si il s’agit du fruit de son imagination.

Critique

Comme à son habitude, le réalisateur Steve Soderbegh crée la surprise ! Format incroyablement inhabituel, histoire terriblement efficace, « Paranoïa » déroute mais cette originalité assumée plaira à coup sûr à bon nombre de spectateurs !

Pernicieux, malsain, les plans caméras installent d’entrée de jeu un attirail intrusif dans la vie de Sawyer. Métrage intégralement réalisé avec un IPhone 7, ce dispositif visuel est grandement similaire à celui d’une télé-réalité d’enfermement… Au travail, au restaurant, en pause-déjeuner, rien ne nous échappe sans qu’elle le sache. On regarde, on observe, le spectateur se conforte rapidement en tant que voyeur, avant de comprendre progressivement qu’il n’est autre que dans la position de l’harceleur…

Acerbe, les premières questions subsistent sur la paranoïa de la jeune femme. Est-elle en démence ? Voit-elle des hallucinations ? Les doutes sont d’autant plus exacerbés que ses réactions d’hystéries et de contestations témoignent d’une ingérence personnelle. Graduellement, la pression redescend, son esprit confus s’éclaircit et notre perception des choses aussi. Moins elle a peur, plus elle en devient forte.

Entre Nate, son point de repère, et Violet, une colocatrice dominée par la folie, Sawyer se retrouve cloisonnée dans une introspection où elle maintient difficilement une stabilité psychique. D’un côté, elle retrouve en le jeune noir, un pied à terre qui lui permet de préserver le sens des réalités extérieures. De l’autre, elle affronte une décérébrée, l’incarnation de sa part d’égarement névrosée. L’ange ou le démon, la bien ou le mal, la raison ou la folie, voilà l’équilibre sur lequel la jeune femme tente de se neutraliser.

Incarné par Joshua Leonard, le personnage du pseudo-harceleur est doctement poussé à son paroxysme. Dans une forme d’antithèse parallélisée, ce psychopathe impose un jeu pervers à sa victime. Lui, alors enfermé dans une chimère psychologique sans issue, jouit d’une liberté physique. A l’inverse, elle, malgré un équilibre psychique, se retrouve privée de sa propriété corporelle. C’est ainsi que s’impose un jeu minutieusement pervers entre la folie mentale de l’un et l’esprit rationnel de l’une, alors qu’il est en liberté, et qu’elle, est emprisonné contre son gré.

Ce comportement évolutif amène la jeune femme à pénétrer dans le jeu de son prédateur. Cette stratégie méphitique pleine d’habilité va d’ailleurs découler sur scène d’affrontement dans une cellule matelassée. Coupés du monde, dans cette pièce, les digues hiérarchiques disparaissent et les deux protagonistes vont se défier l’un et l’autre dans un ludisme manipulatoire extrêmement violent.

Aussi, sans aucun sous-entendu ni autre mise en scène imagée, « Paranoïa » dénonce frontalement le système médical américain. Nate, enfermé aux côtés de Sawyer, lui explique le fonctionnement fructueux des institutions de santé : Tant que les assurances financent, l’internement continue, quelque soit l’avis du patient. Cette dénonciation immorale, qualifiée comme une « arnaque à l’assurance », expose les limites de l’appareil hospitalier états-unien, dont la finalité se veut rentable à tout prix.

Bilan
Finalement, qui est le plus pervers ? L’infirmier stalker ou … ?

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