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Synopsis
Le destin de Simone Veil, son enfance, ses combats politiques, ses tragédies. Le portrait intime d’une femme au parcours hors du commun qui a bousculé son époque. Elle a défendu un message humaniste encore d’une brûlante actualité.
Critique
Attendu avec impatience, le biopic « Simone, le Voyage du Siècle » a été confronté à la pandémie de Covid, repoussant sa sortie à quatre reprises. Après avoir mis en lumière les vies d’Édith Piaf et de Grace de Monaco, le réalisateur Olivier Dahan a décidé de raconter le destin de l’une des femmes les plus influentes de l’histoire de France : Simone Veil.
L’IVG balayé
Dans l’imaginaire collectif, Simone Veil évoque le droit à l’avortement et la liberté des femmes. En conséquence, les attentes suscitées du film reposaient sur la perspective d’un récit axé sur ces deux luttes politiques.
Cependant, après une première partie quelque peu confuse à l’Assemblée Nationale, la question de l’IVG est rapidement balayée. Le film prend délibérément le parti de se concentrer sur l’enfance et de l’adolescence de l’icône, en pleine Seconde Guerre mondiale.
Une sécheresse visuelle
Cette décision de la part du réalisateur est un risque qui s’est avéré difficile à gérer. En effet, au-delà des faits historiques bien connus de la Shoah, l’objectif était de partager les ressentis intimes de Simone Veil. Or, Olivier Dahan semble se débattre sans trouver de direction claire à prendre. Il bute, et le film ne parvient pas à distinguer le vécu personnel de Simone Veil à celui du génocide juif en général.
De ce fait, le film offre que très peu d’images véritablement choquantes. Privilégiant une narration menée par Elsa Zylberstein en voix off, cette sécheresse visuelle soulève des questions sur les budgets déployés.
En fin de compte, si l’on adopte un point de vue pragmatique, l’aspect informatif et documentaire de « Simone, le Voyage du Siècle » est bien plus réussi que la volonté d’une véritable fiction.
Un récit bancal
En voulant réaliser un biopic exhaustif, « Simone, le Voyage du Siècle » s’avère être un film mal construit. Entre des flash-backs trop fréquents et un récit quelque peu bancal, le métrage ne répond pas aux attentes du public.
Par exemple, « De Gaulle », sorti en 2020, prend le parti pris de se concentrer sur une période précise de la vie du Général, à l’aube de la Seconde Guerre Mondiale. Malgré la richesse des événements dans la vie de cet ancien chef d’État, le film choisit de se focaliser sur un seul de ces événements et prend le temps de le développer de manière approfondie.
Une confusion entre politique et émotion
En restreignant la figure de l’ancienne ministre dans un angle politique social et engagé, le film réécrit maladroitement l’histoire en adoptant une sensibilité de gauche clairement biaisée. Icône de la droite républicaine, il est crucial de se rappeler que Simone Veil a été l’une des représentantes du RPR, devenu le parti « Les Républicains » à ce jour.
Ce choix éditorial témoigne d’une confusion de la part du réalisateur, qui n’a pas su démêler les liens complexes entre politique et émotion. Cela peut être trompeur, en particulier pour la jeune génération, notamment pour les spectateurs les moins avertis.
En effet, bien qu’elle ait défendu le droit à l’avortement, la liberté des femmes, et ait mis en lumière les victimes du SIDA, il est essentiel de ne pas oublier sa contribution à la construction de l’Union Européenne avec une vision libérale. Elle fut également l’une des alliées les plus importantes de Jacques Chirac et un soutien indéfectible de Nicolas Sarkozy.
Un casting brillant qui rattrape le tir
Côté casting, Elsa Zylberstein nous offre véritablement la meilleure performance de sa carrière. Fini les rôles stéréotypés de femmes au foyer pimbêche, naïve ou trompée. Enfin, un rôle à la hauteur de son talent ! Son interprétation est claire, posée, et dotée d’une qualité d’éloquence et d’imitation brillante. D’autant plus qu’elle est mise en valeur par un maquillage remarquable.
Par ailleurs, trois actrices de talent incarnent Simone à trois âges différents : Elodie Bouchez, Rebecca Marder et Elsa Zylberstein. Ce choix permet de présenter chaque actrice de manière distincte, sans qu’aucune ne soit éclipsée par les autres. Il faut admettre que le film est brillant sur ce point.
Malgré quelques aspects louables, « Simone, le Voyage du Siècle » ne parviendra malheureusement pas à marquer la décennie simplement pour tromperie sur la marchandise. Avec un point de vue politiquement engagé et des faits historiques non assumés, il est regrettable de constater que le film ne tient pas ses promesses. Le montage est maladroit, les choix éditoriaux manquent de franchise, et le film se révèle très imparfait.
Fort heureusement, le succès rencontré par « Simone, le Voyage du Siècle » en 2021 témoigne de l’intérêt que les Français portent à leur histoire et à la reconnaissance des acquis sociaux. Il y a des figures qui marquent les siècles, et ce film contribue grandement à maintenir un hommage qui n’avait pas encore été rendu jusque là.
[Regardez les premières minutes du film !]
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