« La Voie Royale » – La pyramide vertigineuse du succès

La Voie Royale de Frédéric Mermoud avec Suzanne Jouannet - Affiche Film Cinéphilion

5/5 !

Coup de


Synopsis

Sophie est une lycéenne brillante. Encouragée par son professeur de mathématiques, elle quitte la ferme familiale pour suivre une classe préparatoire scientifique. Au fil de rencontres, de succès et d’échecs, face à une compétition acharnée, Sophie réalise que son rêve, intégrer Polytechnique, représente plus qu’un concours… C’est surtout un vrai défi d’ascension sociale.

Critique

MPSI, ECG ou Hypokhâgnes… Tout ce jargon, ce sont les noms des classes préparatoires qui servent à obtenir les concours d’entrée des plus grandes écoles de France. Dans « La Voie Royale », Frédéric Mermoud nous ouvre les portes de ce milieu élitiste où, être une fille et venir d’un milieu populaire est loin d’être un atout.

Détaché de toute prononciation politique, ce film est une œuvre solaire, remplie d’espoirs et d’ambitions. En portant un regard microscopique sur le transfuge de classe, « La Voie Royale » met en avant les bienfaits d’une Education Nationale, bien trop souvent critiquée.

La Voie Royale de Frédéric Mermoud - Suzanne Jouannet en pleine découverte des classes préparatoire aux côtés de Marie Colomb, sa nouvelle copine, et de Maud Wyler, en professeure

La lutte des classes

« La Voie Royale » raconte l’ascension inattendue de Sophie. En intégrant de hautes études, elle se retrouve rapidement confrontée à des démons qu’elle ne soupçonnait pas. Cette fille d’agriculteur va développer un complexe d’infériorité face à des camarades issus d’une caste prédisposée à la réussite.

A l’image de « Marinette » récemment sortie en salles, le film met en avant une figure féminine, pour insister sur la difficulté à combattre les prédispositions sociales. Il faut savoir qu’aujourd’hui, seules 30% des inscrits en classes préparatoires scientifiques sont des filles. Et face à autant de sélectivité, cette sous-représentation se répercute dans la continuité des cursus.

Aussi, le réalisateur Frédéric Mermoud accentue cette domination sociologique en engluant Sophie dans un contexte familial tendu, celui des manifestations des Gilets Jaunes. Une époque avant Covid où, rappelons-le, le mouvement s’était médiatiquement radicalisé, pour finalement être incompris…

La Voie Royale de Frédéric Mermoud - Suzanne Jouannet en pleine entrairement de colle aux côtés de Thibaut, et d'Alexandre Desrousseaux, alias Jules

Une immersion quasi-documentaire

Ces « prépas » sont des cocons. Des espaces clos dans lesquels les élèves travaillent quotidiennement, sans compter leurs heures. Il n’y a plus de notion du temps. De ce fait, « La Voie Royale » s’inscrit dans une immersion quasi-documentaire. Certaines scènes nous plongent dans des évaluation ponctuelles appelées « Colle ». On ne comprend absolument rien aux formules mathématiques, mais l’objectif est de nous montrer l’ampleur du travail demandé.

Entre pressions et révisions, l’écrémage naturel est inévitable et inclus le départ de certains élèves. Il y a dans un premier temps Thibaut, profil type d’un jeune homme peu préparé à ce rythme soutenu. Mais le film apporte un contre-exemple intéressant en la personne de Diane. Surdouée, major de promo, elle devient rapidement la meilleure amie de Sophie et elles n’hésitent pas à s’épauler dans le besoin.

Son départ volontaire créé inévitablement la stupéfaction. « La Voie Royale » nous montre qu’il ne suffit pas d’être en permanence dans la perfection, mais que la stabilité et la motivation restent des atouts majeurs.

La Voie Royale de Frédéric Mermoud - Suzanne Jouannet et Lorenzo Lefebvre alias Sophie et Hadrien

Un boom vertigineux

Aussi, à travers de l’histoire de Sophie, « La Voie Royale » raconte l’élévation d’une fille d’agriculteur prête à pénétrer la cour des grands. Dans le film, deux repas de famille sont des exemples concrets d’une réalité à laquelle elle va rapidement être confrontée.

Lorsqu’elle rentre chez ses parents pour les fêtes de Noël, elle ramène un gâteau qu’elle a acheté dans une pâtisserie parisienne. Elle annonce l’avoir payé 50 €. Tel un froid qui s’installe, les parents ne comprennent pas, et trouvent qu’elle a changé.

Or, il y a un second dîner de famille qui intervient dans le film. Celui de sa rencontre avec la famille de son nouveau petit ami, Hadrien. Enfant d’une très bonne famille parisienne, elle ne se sent pas du tout à sa place. Elle vit mal l’idée d’être jugée et se rend compte qu’elle est dans un entre-deux inconfortable.

Sophie se retrouve perdue. En pleine exploration d’elle-même, elle va comprendre progressivement qu’elle grandit. Telle une chrysalide, elle vit l’intermédiaire d’un boom vertigineux entre le milieu ouvrier d’où elle vient, et là où elle va atterrir.

La Voie Royale de Frédéric Mermoud - Suzanne Jouannet alias Sophie Vasseur, vit dans un transfuge de classe violent

« La Voie Royale » est un chef d’œuvre exceptionnel doté d’une immense sensibilité. Bourré d’une puissante nostalgie, le film nous renvoi aux souvenirs des grandes études. Ce roman d’apprentissage raconte l’étape cruciale de l’ère postbac, celle qui signe les premiers pas vers l’indépendance. Entre insouciance et décisions majeurs, cette pépite positive glorifie la réussite française à sa juste valeur.

[Bande-annonce – La Voie Royale]

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