3,5/5

Synopsis

Albert et Bruno sont surendettés et en bout de course. C’est dans le chemin associatif qu’ils empruntent ensemble qu’ils croisent des jeunes militants écolos. Plus attirés par la bière et les chips gratuites que par leurs arguments, ils vont peu à peu intégrer le mouvement sans conviction…

Critique

« Une année difficile » est la rencontre de deux grands sujets d’actualités : L’écologie et l’inflation. La fin du monde contre la fin du mois, les réalisateurs se sont emparés de ces thèmes plutôt sérieux pour en faire une comédie audacieuse, éloignée, très éloignée, du politiquement correct.

Faîtes ce que je dis, mais surtout pas ce que je fais !

Dans « Une année difficile », ce qui est particulièrement délectable, c’est la manière dont les personnages sont tournés à la dérision absolue. Faîtes ce que je dis, mais surtout pas ce que je fais !

En tant que militante écolo, Noémie Merlant, alias Cactus, prodigue des leçons de modération à la planète entière, tout en résidant dans un luxueux appartement de 2000 m² dans les quartiers huppés de Paris.

De l’autre côté, Mathieu Amalric, dans le rôle d’Henri, s’impose comme la révélation comique inattendue. Président d’une association venant en aide aux surendettés, il se révèle en réalité être accro aux jeux d’argent, au point d’être persona non grata dans les casinos français.

Puis il y a Pio Marmaï et Jonathan Cohen, alias Poussin et Lexo. Criblés de dettes, ces filous de la combine ne cessent de chercher des astuces pour gratter, s’en sortir et surtout survivre.

Une dure réalité

Ce qui est remarquablement réaliste dans le film, c’est qu’il dépeint des situations dans lesquels des personnes sont littéralement pris au piège dans un système sans issue. Leurs vies ne correspondent pas à leurs aspirations initiales, les obligeant à affronter quotidiennement la dure réalité.

Prenons l’exemple de Cactus. Eco-anxieuse, soucieuse de l’avenir, elle dissimule sa fragilité derrière une détermination féroce à s’engager tête baissée dans son mouvement pro-écolo. Bien qu’elle ait toujours eu tout ce dont elle avait besoin, elle porte en elle ce sentiment de culpabilité d’avoir eu la chance de naître dans une famille aisée. Pourtant, elle se sent désarmée pour agir efficacement sur le plan politique.

On y trouve alors une une forme de déni quant à accepter sa situation et son privilège, un aspect que nos deux compères, Poussin et Lexo, connaissent bien. Endettés au-delà de toute mesure, ils luttent pour s’en sortir, mais en fin de compte, ne recherchent-ils pas une forme de reconnaissance ou d’attention dans leur détresse ?

Au plus près du réel

Comme dans chacun de leur film, et l’exemple le plus marquant reste « Hors Normes », les réalisateurs s’immergent dans les thèmes qu’ils abordent. Pendant des mois, ils travaillant directement aux côtés de véritables professionnels concernés.

Dans le cas de « Une année difficile, » le film rend hommage à l’association Cresus dans laquelle ils se sont rendus. Cette structure offre un soutien crucial aux individus confrontés à des problèmes de surendettement

Deux thèmes distincts, chacun de leur côté

D’un côté, nous observons des personnages ordinaires qui se ruinent dans l’accumulation matériel, tandis que de l’autre, des individus fortunés se privent de tout par culpabilité pour la planète. On ne sait très vite plus où se situer.

Même si le film est très drôle, il peine à trancher entre ces deux modes de pensée. Poussin et Lexo rejoignent le mouvement par opportunisme, sans une véritable conviction, tandis que Cactus les motive sans ne jamais remettre en question son engagement.

Et c’est peut-être là l’une des faiblesses du film : L’endettement et l’écologie sont deux sujets qui demeurent distincts, sans ne jamais se diluer.

L’embrigadement militant

D’un point de vue plus discret, « Une année difficile » explore une facette de l’engagement militant qui diffère de celle que l’on connaît habituellement. Il met en lumière non seulement ceux qui sont animés par des croyances profondes, comme Cactus, mais aussi ceux qui s’engagent sans réelle conviction, comme Poussin et Lexo.

Se laissant au départ entraîner pour gratter des chips périmées et des bières gratuites, ils se retrouvent peu à peu liés à d’autres membres de l’association. Leur motivation s’appuie sur un sentiment d’appartenance, alimenté par la dynamique de groupe et le grand frisson des actions publiques. Toutefois, l’engagement écologique n’a jamais été leur principale motivation.

Finalement, si l’on gratte la surface, le film suggère en toile de fond la démonstration d’un embrigadement politique. Ils évoquent le partage de moments agréables, mais sans véritable appétit militant. Ce processus est d’ailleurs couramment observé au sein d’associations politiques dans les universités réputées et certaines grandes écoles.

[Bande-annonce – Une année difficile]